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Médias Cinéma: « Après mai » et « Le Capital » : le fond de l’air est rouge !

Discussion dans 'Webzine - actualité des luttes et partage d'articles de presse' créé par Ungovernable, 14 Novembre 2012.

  1. Dans « Après mai », Olivier Assayas revient sur les années post-68 et interroge les engagements d’une génération. Dans « Le Capital », Costa-Gavras signe une fable sur la sauvagerie économique. Résultat : deux films politiques stimulants.

    Exceptée leur sortie simultanée dans les salles, il n’existe a priori aucun rapport entre « Après mai », d’Olivier Assayas, chronique intime et collective du début des années 70, et « Le Capital », de Costa-Gavras, fable acide et contemporaine sur les délires de la finance ultralibérale.

    Pourtant, chacun à leur manière (radicalement différente, la manière !), les deux films interrogent le rapport à la chose économico-politique, l’engagement et la façon dont le cinéma peut rendre compte des tumultes du passé et du présent. Décryptage.
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    « Après mai »

    Que sont mes utopies devenues ?

    Deux ans après « Carlos », son fascinant (télé)film sur l’itinéraire du terroriste en son temps, Olivier Assayas, dans « Après mai », revient sur le début des années 70 et son agitation politique, musicale, morale.

    Une période fondatrice pour toute une génération, celle justement d’Olivier Assayas, né en janvier 1955. Le cinéaste ne fait pas mystère de la teneur autobiographique de son nouveau film, mais, par chance, son flirt avec l’autofiction ne rime jamais avec complaisance.

    Très loin des trémolos nostalgiques et des reconstitutions besogneuses (le film, extrêmement précis sur le contexte seventies, ne cède jamais à la tentation du folklore), le cinéaste met en scène un groupe de lycéens qui traversent l’époque dans la fureur du présent et (déjà) l’angoisse des lendemains qui déchantent.
    Jeunesse inflammable

    Au cœur du film : Gilles, un garçon qui compose avec ses engagements gauchistes radicaux, ses crispations amoureuses, ses désirs créatifs et ses tremblements existentiels.

    De la banlieue parisienne à Londres où le cinéma lui tendra peut-être les bras, « Après mai », avec moult ellipses, épouse son parcours et celui de ses proches, représentants jamais caricaturaux d’une jeunesse inflammable et réfractaire aux compromissions.

    http://www.youtube.com/watch?v=Eeuku4vzPkg&feature=player_embedded

    Olivier Assayas, il l’a déjà prouvé par le passé ( « Désordre », « L’Eau froide »), sait comme pas grand monde restituer l’énergie d’un groupe et l’indécision adolescente, période si souvent maltraitée par le cinéma.

    Avec l’histoire de Gilles et de ses ami(e)s, le cinéaste se surpasse et signe un film puissant sur les illusions perdues, la dislocation d’un collectif et les arrangements petits et grands avec la vie.

    En passant, Assayas, sans jamais donner de leçons, interroge le « hiatus » entre les croyances d’hier et la confusion d’aujourd’hui. Il s’en explique :

    « La jeunesse des années 2010 vit dans un présent amorphe. L’idée que l’on puisse avoir prise sur la société, que l’on puisse en repenser la nature même, est devenue très vague et conventionnelle. On s’émeut des injustices sans analyse globale. Dans les années 70, on s’opposait à l’idée même d’Etat. Personne n’avait envie d’être inclus, le programme c’était plutôt d’être exclu. »

    « Après mai », entre autres qualités, observe cet écart, ce gouffre… Et, ce faisant, donne à réfléchir sur l’engagement et la croyance politique, aujourd’hui.
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    « Le Capital »

    Robin des Bois est une ordure

    Bienvenue dans les arcanes de la finance mondialisée… Suite à la maladie subite de son boss, qui, en toute logique boursière, souffre d’insupportables douleurs aux testicules, Marc Tourneuil, employé parmi d’autres d’une banque internationale, se retrouve du jour au lendemain propulsé à la tête de l’institution.

    Son profil terne, sa personnalité effacée, semblent le désigner comme le nouveau patron idéal pour les différents actionnaires de France et d’ailleurs, tous désireux pour des raisons inavouables de manipuler le fantoche.

    Mais Marc Tourneuil (Gad Elmaleh, pour une fois convaincant au cinéma), dévoré par une ambition sans limite, apprend vite au contact de ses pairs et il devient bientôt plus requin que tous les requins qui batifolent dans les mêmes eaux saumâtres que lui.

    http://www.youtube.com/watch?v=mJuyusrcMhk&feature=player_embedded

    L’engagement et la dénonciation ne sont pas exactement des « postures » pour Costa-Gavras, cinéaste qui depuis le tout début des années 70 ( « Z », « L’Aveu », « Etat de siège »…) s’est fait une spécialité des fictions politiques et n’a jamais reculé devant aucun effet pour parvenir à ses fins pédagogiques.

    Signe des temps : Costa-Gavras, aujourd’hui, s’énerve contre la déraison économique et financière. Il s’en explique.

    « Le marché, réalité sans entité matérielle, ressemble à un grand malade qu’il faut rassurer, soigner, contenter pour qu’il se porte mieux. C’est sans doute la découverte de la puissance des hommes comme Marc Tourneuil qui a conduit madame Merkel à imaginer un moyen pour sauver la démocratie. Elle propose “ d’adapter la démocratie au marché ” ! »

    Costa-Gavras à la dynamite

    Pour décrire le parcours de ce Robin des Bois des temps modernes qui surfe sur les dysfonctionnements bancaires et, dixit le film, « vole aux pauvres pour donner aux riches », Costa-Gavras choisit la voie de la fable rageuse. Et signe une fiction où, comme souvent chez lui, la démonstration importe plus que la subtilité dramatique et l’étude circonstanciée des psychologies.

    A ce petit jeu (de massacre), le cinéaste est moins inspiré que dans « Le Couperet », qui traitait de thèmes voisins, mais envisagés du côté des chômeurs. Brutalement contemporain, « Le Capital », malgré ses maladresses, demeure toutefois souvent réjouissant (si l’on ose dire) dans sa description féroce d’un univers sans foi ni loi. Un univers qui, hélas, ne relève en rien d’une vue paranoïaque de l’esprit.

    http://www.rue89.com/rue89-culture/2012/11/14/apres-mai-et-le-capital-le-fond-de-lair-est-rouge-236794
     
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