LES PRECAUTIONS SANITAIRES POUR LA CAPITALE, PAS POUR LA PROVINCE

Au même titre que les programmes et dispositifs sanitaires mondiaux sont lancés par les pays "développés", en vue de se protéger contre les maladies prétendument originaires des pays "en voie de développement" ou "sous développés", le projet de suppression du virus du SIDA à Paris reflète ce qu'on sait déjà : la capitale avant la province. La France, c'est Paris.

Le fameux médicament préventif, le TRUVADA, c'est super, mais il a beaucoup de limites :
- il implique que les populations à "risque" sont complètement stigmatisées
- il a été testé par l'association Sida Sol (France) sur un échantillon de 200 hommes homosexuels (c'est cool, mais y a pas que les homo qui ont le Sida, ce test partait d'un bonne intention, mais il est malheureusement extrêmement ostracisant)
- il implique qu'on "sait" qu'on va avoir un rapport sexuel à risque (en ce cas-là, pourquoi ne pas mettre une capote ? Même pour un(e) prostitué(e) c'est la solution la plus simple et la plus probable en cas de rapport spontané)
- ce médicament concerne aussi sûrement les corps de métiers médicaux en contact avec des séropositifs par exemple, ce qui est encore un facteur de rejet, de barrière entre le malade et le docteur (il est malade, je me protège de lui, en plus des gants, du masque, etc...)
- cela fait un médicament de plus qui provoque dépendance (d'autant plus ici qu'il s'agit d'un préventif, on se sent donc en sécurité quand on le prend) et paranoïa (si on ne le prend pas, on tombe malade). [Ici ça me fait penser à la pilule contraceptive qui provoque la panique chez certaines quand elles oublient une fois de la prendre (il faut alors faire tout un tas de calculs pour savoir à quel moment prendre la suivante, éventuellement aller à la pharmacie etc... que de complexité sur la notice, qui dramatisent complètement le médicament, preuve pour la consommatrice qu'il est vital et que les conséquences peuvent être très graves si on ne le prend pas).]
- il tend à modifier encore le rapport de l'humain à son corps, et aux méthodes de préservation de sa santé (physique et psychologique)
- en plus, cette histoire de TRUVADA est couplée avec plusieurs autres éléments : maintenant, on peut faire l'auto-test du VIH, qu'on achète en pharmacie, qui coûte pas très très cher en soi. C'est super, mais c'est à la fois la conséquence et la cause de la fermeture de beaucoup de planning familiaux, dans lesquels on pouvait aller faire le test anonymement et gratuitement (et en plus on gagnait des capotes et des biscuits). Est-ce que cela signifie que bientôt, TOUS les planning familiaux vont fermer ? En parallèle, il y a le scandale de l'affaire du don du sang : les homosexuels sont traités différemment quant à leur sang, alors que celui-ci est automatiquement testé après prélèvement. De plus, il me semble qu'au regard de la loi, un individu n'a, à aucun moment ni sous aucun prétexte, à se justifier quant à son orientation sexuelle (si tant est qu'il n'en ait qu'une, d'orientation). L'homme homosexuel qui souhaite faire don de son sang doit avoir passé un an sans rapport sexuel, mais qui vérifie ça ? Et surtout, qui a le droit, moralement et éthiquement, de vérifier ça ?

Bref... autant d'éléments qui me tracassent beaucoup, et qui me font penser que c'est génial d'avoir trouvé un médicament qui permet d'avancer un peu dans la lutte contre le Sida, mais qui aussi me font dire que le rapport à cette maladie ne va pas aller en s'arrangeant. Et puis, à quand le convoi de TRUVADA vers les pays d'Afrique ? Non surtout pas, au même titre que Paris c'est la France, l'Occident c'est le Monde.

Bisous.

 

Bonsoir allpower.

Merci d'avoir exprimé un tel enthousiasme vis à vis de mon post.

Si tu t'intéresses à la question sanitaire et aux critiques qu'on peut apporter à ce domaine, je te conseille de bouquiner Sterlin. C'est un sociologue-psychologue-anthropologue qui a beaucoup travaillé sur la question de la gestion de la maladie et de la santé à travers le monde, et notamment dans son article "approche interculturelle du concept de santé", qui tend à remettre l'Occident et ses théories médicales à sa place.